La vie des chefs

Diego DELBECQ – Chef du Restaurant “Rozo” à Lille

31 mai 2019

« On ne va pas mettre la claque de leur vie aux clients, mais simplement qu’ils repartent avec la satisfaction d’avoir mangé quelque chose de bon . »

 

Le Rozo, non je corrige… Chez Diego Delbecq et Camille Camille Pailleau, c’est l’émotion gustative qui est au rendez-vous quand vous entrez dans leur restaurant situé dans le Vieux Lille.
Dans une déco très tendance et à la fois cosy avec leurs immenses miroirs, un mur aux pierres blanchies, et son interminable banquette vert olive, ils ont créé leur univers à eux.

Justesse et équilibre sont associés à l’audace et l’inventivité.
Des plats riches en goût, des produits ultra frais, et surtout ne pas se priver de dessert, ce serait un crime….

Bref, vous l’aurez compris, Diego et Camille font partis des chouchous de Culinari.

Cet article a été enregistré avant l’obtention de l’étoile Michelin pour le Chef et son équipe.

 

 

 

Diego, comment est venue cette envie de cuisiner ?

Ma tante m’a acheté un livre de pâtisserie quand j’avais 13 ans. Tous les dimanches, je faisais un gâteau et je me suis pris de passion pour ça. Ce n’est pas du tout à cause de mes parents ou grands-parents parce qu’ils ne savent pas faire la cuisine. C’est venu comme ça. Je pense qu’inconsciemment on commence par la pâtisserie, c’est ce qui donne envie de manger.

Vous avez fait un parcours dans des belles maisons. C’était un choix ?

Disons que la plus grande maison dans le Nord, c’était chez Monsieur Meurin.
Le feeling a été bon tout de suite donc ça s’est fait naturellement.

Ensuite je suis parti à 23 ans. J’avais envie de bouger et de voir autre chose. J’ai un ami qui m’a dit que Christophe Saintagne reprenait le Plaza Athénée alors on y est allés ensemble. C’est comme ça que je me suis retrouvé là-bas. J’ai aussi travaillé en tant que sous-chef au Meurice, j’y suis allé quand Saintagne est parti là-bas.
J’y ai beaucoup évolué. Puis un jour, il m’a pris dans son bureau en me disant qu’il allait ouvrir Papillon et qu’il me donnait la place de chef si je le suivais.
On a repris un peu le concept de la gastronomie accessible, sans assommer les gens au niveau du tarif.

 

Que pouvez-vous dire sur votre passage chez Mr Meurin ?

Mr Meurin, est quelqu’un de très attachant. Il m’a formé en tant qu’homme. Je suis arrivé à l’âge de 16 ans, l’âge du permis, des copines… Il m’a éduqué sur le savoir-être, la rigueur. La cuisine aussi, évidemment. Mais il a énormément de valeurs humaines et c’est quelque chose que j’aime beaucoup.

 

C’est un des chefs qui vous a le plus marqué ?

Au niveau de l’homme et de l’apprentissage, oui.
En cuisine pure, Ducasse ou Saintagne. Monsieur Saintagne a une vision très particulière de la cuisine.

 

 

« Le Gault & Millau c’est une récompense parce que l’on fait attention aux gens. Ce n’est pas seulement la cuisine, c’est un tout. »

 

 

Vous avez été primé Gault & Millau cette année, en si peu de temps. Qu’est-ce que vous en pensez avec un peu de recul ?

Monsieur Meurin m’a dit un jour une phrase dont je me suis servi et dont je me souviens encore :

Si tu ouvres quelque chose, fais le bien tout de suite

Il m’a dit de taper fort tout de suite et de faire les choses à fond. On l’a fait et ça a fonctionné. Nous n’étions pas sûrs de réussir car nous savons cuisiner mais gérer une entreprise et du personnels, c’est autre chose.

Le Gault & Millau c’est une récompense parce que l’on fait attention aux gens. Ce n’est pas seulement la cuisine, c’est un tout. On vient chez Camille et Diego. ¼ de la salle est remplie par des habitués. C’est la plus belle reconnaissance. Ça me réjouit ce lien avec les gens.

 

Cela a augmenté plus de réservation ?

Le Rozo est plein tout le temps. C’est une récompense à la fois pour nous mais aussi pour les clients. Ils sont tellement contents pour nous !

 

 

« Je savais faire pleins de choses mais je ne savais pas cuire un poisson, faire une sauce… »

 

Pourquoi avoir appelé votre restaurant le “Rozo” ?

C’est en rapport avec la fable de La Fontaine, “le Chêne et le Roseau”. On l’a écrit comme ça par facilité, pour que ce soit retenu plus facilement. C’est une peu une métaphore du parcours professionnel.

Quand on est arrivés chez Ducasse c’était compliqué, techniquement je savais faire pleins de choses mais je ne savais pas cuire un poisson, faire une sauce… J’ai pris une claque. Donc oui c’est un peu une métaphore de tout ça.

Quelle est votre identité culinaire au Rozo ?

Il y a un fil conducteur au Rozo, c’est l’acidité. C’est une cuisine très explosive, avec du pep’s. Quand je propose un plat à la carte, il faut que je le goûte 4 fois avant. Si je vends du Bar à 36€, il faut qu’il soit parfaitement cuit et que la sauce soit parfaitement maîtrisée. Les plats ici sont faits ensemble, on goûte tous ensemble.

 

 

« On ne va pas mettre la claque de leur vie aux clients, mais simplement qu’ils repartent
avec la satisfaction d’avoir mangé quelque chose de bon
« 

 

 

 

Il faut être précis. Ça me semble inconcevable par exemple que les aliments voient le frigo une fois cuits.

 

J’ai lu que les champignons étaient l’un de vos plats phares ?

Oui. C’est un peu un mélange de tout ce que j’ai vu. Dedans il y a un crémeux de champignons de Paris. C’est une recette de Monsieur Meurin.
Et il y a aussi la vision de la cuisine de Saintagne au niveau de la texture, de l’acidité et du contraste.
C’est la seule recette qui représente le restaurant je trouve.

De manière générale je pratique une cuisine assez tiède. Le Bar par exemple, je le cuis à l’unilatéral, maximum à 40 degrés. Je trouve qu’on perd les saveurs quand c’est très chaud

Pourquoi avoir choisi la gastronomie abordable ?

On ne va pas se mentir, le but c’est avant tout de remplir le restaurant. Si je fais un menu à 120€, il sera rempli à moitié. Mon but c’est de pouvoir payer tout le monde le 1er du mois, même les fournisseurs. Tout le monde a besoin de manger.

 

Est-ce que ce n’est pas un peu dangereux comme modèle économique ?

J’ai eu le premier bilan et ça va. Le midi, je fais un menu à 29€ et je ne fais pas beaucoup d’argent. C’est un menu d’appel. Pour faire de l’argent, il faut faire de la quantité.

Vous dialoguez beaucoup avec les chefs de la région ?

On discute de tout et de rien. On discute de produits, de matériel…
À Lille il n’y a pas de concurrents, il n’y a que des confrères. Il y a beaucoup de chefs qui font bien mais tous différemment.

Quel est votre péché mignon en cuisine, même le plus basique ?

Je ne peux pas le dire <rires>. C’est un kebab.
C’est d’ailleurs un truc que j’aimerais ouvrir. Avec un agneau entier et deux sauces maison : une harissa et une sauce blanche.
Qu’est ce qui n’est pas bon dans un kebab ? Les oignons, les tomates et la salade à cause de la fraîcheur et quand c’est hors saison. En prenant du chou quand c’est la saison, des carottes quand c’est le moment… Ça pourrait être parfait.

Vous faites la cuisine et Camille les desserts. A la maison comment ça se passe ?

C’est Camille qui cuisine beaucoup. Elle cuisine bien. On va beaucoup manger chez les copains aussi

Vous avez d’autres projets dans la tête ?

Je me rends compte de plus en plus que le gastro me poursuit tout le temps. Je veux faire trop précis et quand on est 7 en cuisine avec 40 couverts; il y a un moment où on ne peut plus faire au-dessus. J’aimerais faire un restaurant de 15 couverts en étant 4 en cuisine. Une brasserie aussi. Pour moi ce n’est pas péjoratif quand c’est bien fait. Rien que des bonnes frites fraîches cuites deux fois…

Vous gérez comment votre communication aujourd’hui ?

Il y a des mecs qui charbonnent et qui n’ont pas l’argent ou le temps pour la communication et qui font bien mieux. C’est dommage. Nous par exemple, on met une photo tous les je ne sais pas combien. On a pas le temps, on charbonne pour sortir des trucs carrés !

 

Un mot pour vous définir ?

C’est dur ça ! Il y a deux côtés. Je suis très speed, presque impulsif. Mais je suis très attaché aux gens. Je ne me rends pas forcément compte que tout le monde ne peut pas mettre le même investissement personnel que moi.

 

 

 

 

 

Adresse : Restaurant Gastronomique Le Rozo – 79 Rue de la Monnaie – 59000 Lille
Téléphone : 09 83 46 55 00
Site internet : https://www.restaurant-rozo.fr

 

Crédit Photo : Marco STRULLU©

 

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