La vie des chefs

Nicolas Gautier – Chef du restaurant Nature à Armentières

4 septembre 2018

“Je me fixe un objectif par jour : j’en avais un hier, aujourd’hui j’en ai un nouveau ».

 

Lorsque je suis arrivé au restaurant Nature, à côté de l’église Saint-Vaast d’Armentières, tout le monde était en activité avant l’ouverture, prêt à démarrer une nouvelle journée.

Nicolas Gautier, ancien chef d’un établissement réputé de la région lilloise, a choisi, avec sa femme Cécilia, ce lieu intimiste, pour vous offrir un moment de découverte gastronomique frais, authentique et délicat.

 

Quelle est votre histoire, chef ?

Je suis fils de restaurateur. Mes parents avait un établissement dans l’Aisne, à Fontenoy d’abord. J’ai toujours vécu au-dessus des restaurants. Obélix est un petit joueur à côté de moi, je suis tombé dans la gastronomie étant petit. Dès mon premier mois de vie, j’étais en cuisine avec mes parents jusqu’à mes 14 ans où j’ai décidé de continuer dans cette voie. C’est en regardant mon père en cuisine et ma mère en salle que j’ai eu envie de faire comme eux. Tout ça s’est fait très naturellement pour moi. J’ai réalisé mon apprentissage dans un établissement réputé de l’Aisne. J’ai aussi voyagé un peu partout.

 

Pourquoi avoir choisi de vous installer dans les Hauts de France à Armentières ?

Parce que j’aime bien la région. Venant de l’Aisne, on a été accueilli royalement à Armentières avec mon épouse : par les gens, par les chefs. Alors quand on a décidé de vraiment s’installer, on ne se voyait pas ailleurs tout simplement.


Quel est le concept de votre restaurant ?

Un concept ? Il n’y a pas de concept : c’est un restaurant qui fait à manger aux gens pour leur faire plaisir. On l’a appelé Nature, non pas à cause du cadre ou des produits naturels mais parce qu’on y fait les choses naturellement. Ma femme (qui travaille en salle) et moi faisons les choses comme on aimerait qu’elles soient faites quand nous nous rendons nous-mêmes dans un restaurant. C’est donc une évidence pour nous de travailler avec les producteurs de la région. On a toujours travaillé comme cela et on continue à le faire de plus en plus.

 

Où puisez-vous votre inspiration ?

Le seul chef dont je me sois inspiré, c’est mon père, de ses recettes traditionnelles que lui travaillait, elles sont aujourd’hui les bases de ma cuisine. Je les ai ensuite développées et personnalisées. Autrement mon inspiration vient de l’endroit ou je trouve et du moment présent, rien de plus.

 

On a de la chance : dans notre métier on apprend jusqu’à la fin de notre vie.”

 

Trouver une recette, souvent ça se passe entre minuit et 3 heures du matin, quand on a la tête sur l’oreiller. Souvent cela vient naturellement mais dans les autre cas, je peux avoir besoin d’aller chez un producteur, d’aller le vendredi matin au marché d’Armentières, penser à autre chose, se vider l’esprit. Pour moi, la meilleure façon d’être créatif, c’est de rencontrer les gens. Sans l’ouverture d’esprit, on ne peut pas être créatif.

 

« La meilleure façon d’être créatif, c’est de rencontrer les gens »


Votre plus belle rencontre gastronomique ?

Je n’en ai pas une, mais plusieurs. La cuisine n’est pas faite que d’une chose mais de plein de rencontres, de produits, de producteurs, de saisons et d’émotions. Mais j’ai un chef préféré : Michel Bras, qui est pour moi un avant-gardiste, un précurseur. J’aime sa réflexion et ses façons de faire autour de la cuisine ”brute”, une cuisine au plus proche de la nature.

 

“Aujourd’hui, c’est la betterave, tout simplement parce que j’ai envie de manger des betteraves. “


Quel produit local aimez-vous travailler ?

J’aime bien la betterave. Parce que c’est un joli produit. C’est un produit qui est à la fois compliqué et simple. Cela me fait plaisir quand des clients me disent qu’ils n’aiment pas la betterave et ensuite “vous m’avez fait découvrir la betterave autrement, c’était drôlement bon”. Mais en réalité, je n’ai pas de produit fétiche ou de produit star comme certains chefs.

Mon père m’a toujours dit qu’on a de la chance dans notre métier parce qu’on apprend jusqu’à la fin de notre vie. Il existe tellement de milliards de produits sur terre, tellement de saisons, tellement de façons différentes de travailler qu’on a jamais tout vu. Aujourd’hui, c’est la betterave, demain c’est le champignon. Et aujourd’hui, c’est la betterave, tout simplement parce que j’ai envie de manger des betteraves.

 

Un plat signature ?

Le Welsh revisité. On le travaille de manière très aérienne en émulsion. Les gens sont toujours très surpris car ce plat est bien connu pour être très lourd dans sa version classique. Là, on en a fait tout l’inverse avec une recette vraiment légère tout en respectant ses saveurs emblématiques. C’est un plat que les gens adorent et nous réclament.

 

Pouvez-vous nous décrire une journée dans votre restaurant ?

Levé entre 6h généralement, je pars aux achats ensuite à 9h. Généralement j’ai ¾ d’heure où je gère tout l’administratif. Au plus tard, à 9h45, je suis en cuisine avec l’équipe. Nous sommes 3 en cuisine, 3 en salle. On voit ensemble les préparations du jour. J’ai confiance en mon équipe souvent je les laisse faire, sauf en cas de coup de speed, alors je participe à la mise en place.

 

“Je me fixe un objectif par jour : j’en avais un hier, aujourd’hui j’en ai un nouveau. Et tant que je ne l’aurais pas atteint, je n’irais pas me coucher.”

Comment vous définit votre brigade ?

La meilleure façon de le savoir, c’est de leur demander ! Certains disent que je suis franc du collier, que je ne passe pas par quatre chemins. Je suis assez direct maintenant. J’ai retiré tout ce qui était futile dans ma manière de travailler, je ne m’y attarde pas.

Je me fixe un objectif par jour : j’en avais un hier, aujourd’hui j’en ai un nouveau. Et tant que je ne l’aurais pas atteint, je n’irais pas me coucher. Et c’est tous les jours comme cela. L’objectif du jour c’est de trouver un dessert autour du lait et je ne vais pas le lâcher tant que je n’aurais pas trouvé. Je pense que mon équipe le ressent. Je ne suis pas compétiteur, parce que je me positionne pas en opposition aux autres. Moi, je me bats contre personne, juste pour rendre les gens heureux quand ils viennent dans notre restaurant, pour qu’ils reviennent et qu’au final je puisse à mon tour nourrir ma famille et faire profiter mes famille et notamment mes deux garçons du travail que je fais.

 

“Si tu as atteint tous tes objectifs avant de mourir c’est que tu n’as pas visé assez loin”


Des projets ?

Oui j’en ai plein ! J’adore le dicton d’un très grand chef Dan Barber  (Ndlr : Pionnier du « farm-to-table », porte-parole d’une agriculture vertueuse, il conseille même Barack Obama) qui dit “si tu as atteint tous tes objectifs avant de mourir c’est que tu n’as pas visé assez loin”.

Donc des projets, j’en ai 50 ! Je veux remplir le restaurant midi et soir, j’adore les voitures de sport, je voudrais un autre établissement en plein milieu de la campagne, je voudrais ouvrir une brasserie dans mon village où je choisirais la cuisine de mon père avec beaucoup de cocottes.

 

Qui est-ce qui cuisine à la maison ?

Il vaut mieux que ce soit Madame. Je cuisine super mal à la maison. Tout est trop petit : la gazinière, les poêles ne sont pas assez hautes. Ma femme cuisine très bien : elle fait plein de plats mijotés. Elle le fait super bien alors pourquoi je m’embêterait ? Cela m’éclate de faire la cuisine au restaurant mais ça ne m’amuse pas de faire à manger pour 4 personnes. Si j’invite des copains à diner, je fais une tartiflette ou une bonne raclette. Et ils font la même chose pour moi quand ils m’invitent. Les vrais amis savent qu’il ne faut pas mettre les petits plats dans les grands. Je suis très simple. Une bonne tartiflette, un bon verre de vin et ça me va très bien !

 

Adresse : 20 Place Saint-Vaast, 59280 Armentières
Téléphone : 03 20 87 93 05
Site internet : https://www.restaurant-nature.com/fr/

 

Crédit photo : ©Sophie Stalnikiewicz

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